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LA COLLABORATION
LA COLLABORATION
Le 30 octobre 1940, six jours après sa rencontre avec Hitler à Montoire,
le maréchal Pétain s’adresse aux Français :
« Français, j’ai rencontré jeudi dernier le chancelier du Reich.
Cette rencontre a suscité des espoirs et provoqué des inquiétudes…
Une collaboration a été envisagée entre nos deux pays.J’en ai accepté le principe ».
Le maréchal Pétain croit, comme la majorité des Français à cette époque, que la victoire des Allemands est inéluctable et définitive.
Il pense pouvoir améliorer le sort des Français et notamment celui des prisonniers de guerre en collaborant avec l’Allemagne.
La Collaboration va prendre deux visages :
idéologique et économique.
On a beaucoup écrit sur la collaboration d'État par ce qu'elle est la plus sensible en premier militaire puis ensuite policière conduisant à une dictature révolutionnaire dont les précédents articles ont montré l'importance sur la vie des Français, mais la question des entreprises collaboratrices semble avoir été mise à l'écart à la libération, et pourtant de nombreuses ont collaborés comme ces grandes entreprises Renault, Worms, Berliet ou les patrons se sont retrouvés en prison après la libération.
Il apparait en effet que le patronat a bénéficié d'une certaine indulgence.
Dans les faits, les entreprises Françaises n'avaient probablement pas d'autres possibilités que de collaborer, comment faire autrement pour exister, et pour eux ce fut une source de profits, le Reich payait bien, notre dette de l'armistice revenait sous une autre forme.
On peut considérer, en se fiant aux meilleures estimations, qu'un bon tiers de la production industrielle Française et plus de la moitié après la mi-1942 a franchi le Rhin à cette époque. A titre personnel, certains patrons ont été résistants, et la proportion de ceux qui ont rejoint «l'armée de l'ombre» est peu différente, à en croire les statistiques disponibles, de celle que l'on rencontre dans les autres catégories sociales.
En revanche, et c'est ce qui explique l'ampleur des livraisons au Reich, très rares ont été les cas d'entreprises résistantes, comme Hispano-Suiza, célèbre pour ses automobiles, mais surtout fabricant de matériels de guerre, dont les dirigeants, sollicités par les Allemands, ont refusé de travailler pour eux, mettant en péril l'existence même de la société et de son outil de production.
L'atelier des usines Berliet à Vénissieux
De la référence lLes patrons sous l'ocupation
L'économie Française a donc travaillé presque pour l'Allemagne entre 1940 et 1944 devant s'acquitter d'abord de la dette de guerre fixée par l'armistice de juin 1940, mais pratiquement fixée au cours des ans de façon unilatérale par les Allemands qui établissaient arbitrairement le taux du franc par rapport au mark.
Cette dette, censée correspondre à l'entretien des troupes d'occupation a été en moyenne de 400 millions de francs par jour, l'équivalent de quatre millions de salaires journaliers d'ouvriers.
L'emploi du terme de «collaboration économique» signifie que la politique prédatrice de l'Allemagne s'est effectuée sous administration Française comme conséquence désastreuse de l'armistice de 1940.
1930
La collaboration économique pendant l'occupation.
A cette ponction forcée on peut y ajouter le travail des prisonniers de guerre, qui sont 1,5 million à travailler pour l'Allemagne en Allemagne pendant presque toute la durée de la guerre.
En octobre 1940, on comptait en France un million de chômeurs, conséquence de la désorganisation complète de l'économie due à la débâcle.
Rapidement après l'armistice, le gouvernement de Pétain décida d'autoriser les entreprises Françaises à accepter des contrats avec les Allemands.
Les commandes Allemandes seront le principal moteur du redémarrage de l'économie Française.
Il est évident que les condamner dans ce cas aurait été un non sens comment donner du salaire, donc de quoi vivre, si les entreprises ferment pour ne pas traiter des affaires avec les Allemands.
Le nombre de chômeurs était descendu à 125 000 en 1942,
et à la Libération, il était pratiquement nul.
De façon générale, avec les indemnités d'occupation, l'Allemagne arrive à faire travailler l'agriculture et l'industrie Française en grande partie pour son compte, en 1943, d'après les statistiques de l'Office central de la production industrielle,
100 % de l'industrie aéronautique, 100 % de la grosse forge, 80 % des BTP, 60 % de l'industrie du caoutchouc travaille pour le compte de l'Allemagne.Henri Rousso note que les chiffres sont probablement surévalués, mais qu'ils donnent un ordre de grandeur correct.
Selon l'historien Allemand Eberhard Jäckel,
« Au printemps de 1942, 170 000 Français travaillaient sur place dans les services de la Wehrmacht , 275 000 à la construction d'aérodromes et de fortifications comme le mur de l'Atlantique, 400 000 enfin à la fabrication d'armements», Eberhard Jäckel ,
«La France dans l'Europe de Hitler», Fayard, 1968, p. 320.
En outre, entre 1942 et 1944, le commissaire général du Reich pour l'emploi et la main d'œuvre, Fritz Sauckel va exiger que la France envoie deux millions de travailleurs au titre du STO.
Seuls 600 000 partent effectivement, qui s'ajoutent aux 700 000 travailleurs volontaires, volontaires et STO sont plus ou moins bien rémunérés.
Selon le général von Senger und Utterlin de la Commission d'armistice Allemande,
«l'industrie Française des armements de guerre fut remise sur pieds pour les armements Allemands. Sans le potentiel économique de la France, Hitler n'aurait pas pu faire durer la guerre aussi longtemps. C'est cela qui fut le grand profit qu'Hitler tira de la conquête de la France».
Deux auteurs, Fabrizio Calvi et Marc Masurovsky , montrent dans un ouvrage, Le Festin du Reich, 2006, que des banques Américaines à Paris «avaient continué à faire commerce avec les nazis pendant toute la guerre» malgré les «lois, ordonnances Américaines réprimant le commerce avec l’ennemi», et qu'elles ne furent guère inquiétées par la mission Matteoli. Lire l'entretien avec Fabrizio Calvi sur Le Festin du Reich, mars 2007.
* Louis Renault a été accusé à la Libération de collaboration avec l'armée Allemande.
Les usines groupe Renault furent confisquées et nationalisées sous ce motif.
* Gnome et Rhône fournissait des moteurs d'avions à l'Allemagne.Elle fut nationalisée à la Libération pour faits de collaboration et deviendra
la Snecma,
actuelle société Safran.
* Berliet
* En mai 1941, après les premières arrestations de juifs, l'entreprise Photomaton propose ses services à l'occupant,«Nous pensons que le rassemblement de certaines catégories d'individus de race juive dans des camps de concentration aura pour conséquence administrative la constitution d'un dossier, d'une fiche ou carte, etc. Spécialistes des questions ayant trait à «l'identité», nous nous permettons d'attirer particulièrement votre attention sur l'intérêt que présentent nos machines automatiques Photomaton susceptibles de photographier un millier de personnes en six poses et ce en une journée ordinaire de travail», Renaud de Rochebrune et Jean-Claude Hazera, Les Patrons sous l'occupation, Odila Jacob, 1995.
* Des entreprises du BTP, comme Sainrapt et Brice, et des cimenteries ont participé à la construction du mur de l'Atlantique.
* Banque Worms, bien introduite au sein du régime de Pétain, avec notamment Jacques Barnaud, 1893-1962, responsable des relations économiques Franco-allemandes et Pierre Pucheu, une présence qui a entraîné bien des fantasmes, voir la Synarchie.La collaboration artistique
Des hommes du monde du spectacle, par exemple Sacha Guitry, furent un moment taxés de collaboration parce qu'ils avaient, pendant l’occupation, continué à exercer leur métier et avaient entretenu des relations pour le moins cordiales avec l'occupant.
De fait, si nombre d'autres artistes, comme Ray Ventura, avaient émigré à cette époque, un certain nombre d'autres ont, pour reprendre l'expression de Guitry, continué à exercer leur métier, comme tous les autres Français restés sur le territoire national, à la seule exception de ceux qui avaient pris le maquis.
Il n'en reste pas moins que plus d'une personnalité des arts et des spectacles ne manifesta aucun état d'âme particulier à s'afficher régulièrement aux côtés des Allemands, et que ceux-ci furent largement mêlés pendant quatre ans à la vie d'un Tout-Paris pas toujours regardant.
Quelques témoignages
Panneau à l’exposition anti-juive de Paris, octobre 1941. © LAPI / Roger-Viollet 874-11,
référence, La France pendant la seconde guerre mondiale.
Je n'ai pu publier cette image, mais vous pouvez la consulter en
cliquant sur la référence citée
Artistes de music hall rentrant d’Allemagne, Gian Roberte, Ginette Werden-Nello, Rinatis, Suscitio.... Paris. Juillet 1943. © LAPI / Roger-Viollet 2152-13, référence, La France pendant la seconde guerre mondiale.
Retour d’Allemagne des écrivains Français. De gauche à droite, lieutenant Gehrard Heller, Pierre Drieu La Rochelle, Georg Rabuse, Robert Brasillach, Abel Bonnard, André Fraigneau et Karl Heinz Bremer. Paris, novembre 1941. © LAPI / Roger-Viollet 533-1, référence, La France pendant la seconde guerre mondiale.
Charles Trenet sous l'occupation
La presse collaborationniste
Avant le début de la Seconde Guerre mondiale, le décret-loi du 26 juillet 1936, décret Daladier, institue un «Commissariat Général à l'Information» qui dépend directement de la Présidence du Conseil. Dirigé par le diplomate Jean Giraudoux, il est chargé de contrôler les médias et mobiliser l'opinion contre l'Allemagne nazie.
Pendant la Drôle de guerre, le commissariat est transformé par le décret du 1er avril 1940 en «Secrétariat d'État de l'Information et de la Propagande » du Ministère de l'Information sur lequel va s'appuyer la collaboration pour faire accepter aux Français la défaite à travers trois médias, France-Actualité pour les actualités cinématographiques,
Radiodiffusion nationale et la presse écrite.
Les principaux journaux de presse existant alors adoptent trois attitudes, soit ils se sabordent
comme
Le Canard enchaîné, l'Intransigeant, le Populaire ou l'Humanité, soit ils se replient en zone libre dès le 10 juin 1940, essentiellement sur Lyon où
existent de nombreuses imprimeries, comme
Le Journal, Paris-Soir ou le Figaro, soit ils décident de reparaître en zone Nord, comme Je suis partout ou Le Matin.
La majorité des titres de la presse collaborationniste en zone occupée étaient subventionnés ou détenus en sous-main par l'ambassade d'Allemagne d'Otto Abetz, qui a créé à cet effet les Éditions Le Pont.
La presse parisienne est dominée par la personnalité du patron de presse Jean Luchaire . L'ambassade d'Allemagne exerce principalement la propagande et la Propaganda Staffel se spécialise dans la censure, notamment grâce à ses bureaux en province.
A part les ultra-collaborationnistes, les journalistes agissent plus par opportunisme, appât du gain, ou lâcheté que par idéologie alors que les salaires en France sont bloqués, leurs appointements sont doublés par l'entremise de la Propaganda Staffel.
La presse pétainiste en zone libre soutient majoritairement la politique collaborationniste et antisémite de Pétain en pratiquant l'autocensure car elle est contrôlée par le «Secrétariat d'État de l'Information et de la Propagande» du Ministère de l'Information,
dirigé par Paul Marion puis Philippe Henriot.
Des dizaines d'écrivains ou journalistes de renom
furent des collaborateurs
Les articles spécialisés permettent de connaître plus en détail la nature des engagements de différents écrivains de renom en faveur de l'occupant ou de la Révolution nationale.
* Jacques Benoist-Méchin, historien
* Henri Béraud, journaliste, écrivain
* Abel Bonnard, académicien
* Georges Albertini, journaliste et secrétaire général du RNP
* Robert de Beauplan, journaliste, écrivain
* Robert Brasillach, journaliste, écrivain
* Charles Spinasse, député socialiste et fondateur de l'hebdomadaire collaborationniste Le Rouge et le Bleu
* Louis-Ferdinand Céline, écrivain
* Paul Chack
* Jacques Chardonne, romancier
* Alphonse de Chateaubriant
* Pierre Drieu La Rochelle
* Abel Hermant, académicien
* George Montandon, ethnologue
* Lucien Rebatet, romancier
* Camille Mauclair, écrivain
* Charles Maurras, directeur du journal L'Action française.
* Maurice Sachs, écrivain, juif, collaborateur.Quelques témoignages
«Je suis partout», hebdomadaire politique et littéraire dirigé par Robert Brasillach, juillet 1941. © Roger-Viollet 11136-11, référence, La France pendant la seconde guerre mondiale.
Kiosque à journaux, Paris. © André Zucca / BHVP / Roger- Viollet 37817-2, référence, La France pendant la seconde guerre mondiale.
Vente dans la rue du journal de Jean Luchaire. © André Zucca / BHVP / Roger-Viollet 37809-12, référence, La France pendant la seconde guerre mondiale.
La suite 53 portera sur le Service du Travail Obligatoire.
Tags : francais, guere, allemand, france, collaboration
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