• Vers la Zone Libre et bientôt la Résistance armée


    Vers la Zone Libre

    et bientôt
    la Résistance armée

     

     

     

     

     

    Léonce retrouve donc sa femme Madeleine et ses deux filles qui avaient été hébergées par sa soeur au village voisin de Couis, sur la commune de St Ciers du Taillon.

    Il comprend très vite que son "pays", la Charente-Inférieure devenue depuis le 4 septembre dernier la Charente Marime, est passé depuis 18 mois déjà sous le joug allemand.

    En effet, les ports de La Rochelle et Rochefort avaient été bombardés quatre nuits durant du 19 au 22 juin 1939.

    Dès le 23 juin , les éléments avancés de la "1ère Armee Korps" venus par le nord avaient pris La Rochelle et Royan.
    Quelques jours plus tard étaient arrivées les premières troupes d'occupation de la 44ème division d'infanterie.

    Le port de La Rochelle sert déjà de port militaire pour la "KriegMarine" qui cherche à couper le ravitaillement maritime des Etats-Unis vers la Grande-Bretagne.
    L'Arsenal de Rochefort "héberge" l'artillerie de la Marine.

    De surcroît, son bon village de Consac est situé dans une zone très sensible.
    Dans le but de sécuriser au mieux leurs installations côtières, les autorités allemandes avaient creé en octobre dernier (1941) une zone interdite aux non-résidents.
    A l'intérieur de cette zone la population était entièrement soumise au bon vouloir des Allemands et chacun de ses faits, gestes et mouvements surveillés -quand ils ne devaient pas être autorisés -.

    Les Allemands exercent un strict contrôle de la population dans les gares (La Rochelle, Rochefort, Saintes, Jonzac, Royan), surveillent les lignes d' autobus de la Compagnie Aunis et Saintonge, les routes.
    Seules les personnes habitant la zone ou y travaillant peuvent s'y déplacer librement ; dans le cas contraire elle doivent obtenir un" Ausweiss" pour circuler.
    Consac se situe sur la limite sud de cette zone. Cette limite est fort mouvante selon l'humeur de l'occupant.

    L'insécurité est donc totale d'autant plus que l'Administration Préfectorale avait crée en Aôut 1940 une "Garde Civile" devenue plus tard "Garde Civique".
    A l'origine, cette "garde" avait été mise sur pied pour surveiller le câble téléphonique entre le port militaire de La Pallice (La Rochelle) et Royan qui avait fait l'objet de sabotages en juin 1940. Mais elle se transforma rapidement en véritable force de police d'appoint, susceptible d'intervenir pour le maintien de l'ordre, surveiller les mouvements de personnes.
    En réalité, elle était une véritable force policière aux ordres du Maréchal Pétain ; les années qui suivirent le prouveront puique certains de ses éléments ne cacheront pas leur activité "collaboratrice" et iront même jusqu'à s'engager dans la future Milice qui sera créée en Janvier 1943.


    La présence de Léonce sur ses terres faisait donc courir d'énormes risques à toute sa famille.
    Il apprend que certaines personnes se sont déjà distinguées par leur zèle à informer les Allemands ; les informations circulent vite dans les petits villages comme le sien, la collaboration est déjà bien efficace.

    Il décide donc qu'il doit retourner en Dordogne avec femme, enfants, bagages......et plus (nous le verrons plus tard) car il y dispose d'un point d'accueil et surtout parce qu'il pense que les risques sont moindres en zone libre. L'avenir lui prouvera le contraire.

    Fin 1941, il rejoint à pied à Périgueux accompagné du fils d'un tenancier de bar de la localité et d'un neveu Robert G. âgé de19 ans (dénoncé à tort par le maire de la commune aux Autorités allemandes pour avoir refusé de passer son conseil de Révision).
    Ayant déjà franchi la ligne de démarcation, la refranchir à nouveau grâce à un passeur fût une formalité pour le chasseur qu'il était. 140 km à pied, par mauvaises routes, chemins et bois....ce n'est pas rien!!Léonce "connaissait déjà la musique", comme ancien marcheur sportif et évadé, ses camarades....non!!

    Un temps hébergés par le tenancier du bar, ils trouveront au bureau de placement de la main-d'oeuvre un emploi dans une entreprise de bâtiment de la ville.

     

    Ne supportant pas les frictions avec les autres ouvriers (les nerfs étaient à vif sans doute à cause de la présence d'ouvriers de plusieurs nationalités et le fait que Léonce n'était du genre à se laisse marcher sur les pieds, aidé par sa haute stature de tailleur de pierre), ils trouvent grâce au bureau de placement deux emplois au Château de Mme B. à Château l'Evêque.

    La propriétaire, une veuve autoritaire mais pas "méchante femme" selon nos deux lascars était emblématique d'une certaine catégorie de français de l'époque.

     

    En effet, elle fréquentait et recevait dans ses salons des notabilités locales pétainistes à qui on réservait le pain blanc et le bon vin mais, dans le même temps, fermait les yeux sur les petits délits et autres libertés que s'accordait son personnel, au point de refuser de livrer à la gendarmerie française un ouvrier soupçonné de braconnage.

     

     

    Léonce hiver 1941-1942 à Château-l'EvèqueLéonce était employé aux travaux agricoles et faisait office de cocher pour emmener Mme B. en calèche à Périgueux rendre visite à son fils.
    Cette calèche allait lui être d'une grande utilité!!!!!!!!!
    Quant à son neveu Robert G., il était chargé de l'entretien du château et avait donc facilement accès à l'intérieur de celui-ci et à ses endroits stratégiques ; ce qui permettait à nos deux lascars et surtout à Léonce de s'alimenter plus "confortablement" que Mme ne le voulait.


    La situation paraissant suffisamment sécurisée, il fit venir sa femme Madeleine qui fit le trajet à pied depuis Consac et dût franchir la ligne de démarcation seule pour arriver à Château l'Evêque où elle assurera le service de Mme, le ménage, la cuisine et diverses autres tâches.
    Madeleine dût donc faire 150 km à pied dans les mêmes conditions que son baroudeur de mari quelques mois plus tôt. Chapeau Grand-mère!!

    Le couple était reconstitué, mais après combien de kilomètres parcourus à pied et d'insécurité. Certes, leurs deux filles n'étaient pas avec eux mais étaient en sécurité là-bas, dans la famille, en zone occupée.
    Ils iront les chercher plus tard à vélo.


    Léonce, espiègle, débrouillard cherchera toujours à améliorer l'ordinaire imposé par la Chatelaine en mettant en pratique ce qu'il avait appris dans sa jeunesse en Saintonge.
    Sa grosse carcasse, mise à dure épreuve par sa captivité puis sa longue évasion à pied se reconstituait ; il lui fallait donc l'alimenter! Tous les moyens étaient bons !!!!!

    Quand il partait labourer les champs de la patronne avec une paire de vaches liées par un joug (les boeufs se faisaient rares à cette époque), il n'oubliait pas de pose des "grippets" pour attraper des grives, merles et autres petits volatiles qu'il faisait fricasser lui-même avec des oignons. Un jour, la chatelaine, "par l'odeur alléchée" découvrit le pôt aux roses et poussa une grosse colère au seul motif......que ce n'était pas bien de tuer ces pauvres petits oiseaux! Ouf!
    Quand il ne les mangeait pas, il allait les vendre à Périgueux, avec moultes lapins attrapés au collet (toujours à l'insu de la chatelaine bien sûr) afin d'acheter du tabac, quelques victuailles et du vin qu'il ramenait dans la calèche, lors des sorties de Mme. Ah, cette sacrée calèche!!!

    Léonce avait le sens du culot assez développé (version opportunisme).
    Un jour, il découvre une certaine quantité d'oeufs dérobés par un autre ouvrier du château, cachés dans une barique vide.
    Il s'empresse d'aller les vendre à Périgueux et achète du vin qu'il ramène au Château pour sa consommation personnelle.
    Sa patronne, croyant qu'il apportait ce vin pour les besoins du château, se proposa de le rembourser des frais engagés.
    Ce qu'il s'empressa d'accepter!!!

    Léonce, en trouvant cet emploi en zone libre, avait donc réussi à récupérer sa forme physique mise à mal par sa captivité et son évasion, retrouver sa femme Madeleine (la marcheuse courageuse elle aussi) et envisageait déjà de faire venir ses deux premières filles de sa Saintonge natale.

    Mais il s'accommodait de plus en plus mal de cette situation "burlesque" d'évadé accompagné de sa femme, employés tous les deux par une chatelaine plus ou moins pétainiste, ou pour le moins conciliante avec les autorités.
    De plus, son esprit rebelle et indépendant provoquera de vives tensions avec un autre ouvrier plutôt docile et porté sur le renseignement, voire des frictions musclées avec la gendarmerie locale à qui il promettait "d'écrabouiller le képi" avec une buche de bois.
    Il sentait que la situation devenait malsaine et qu'il avait envie maintenant de passer d'une position attentiste à une position plus active. Le rebelle allait s'engager plus avant.

    Grâce au bureau de recrutement de Périgueux, il trouve un emploi d'ouvrier forestier à Montagnac la Crempse.
    Il quitte donc le château en Mai 1942 avec sa femme Madeleine pour s'installer dans une petite maisonnette à La Taillerie à Montagnac.

    Ginette revient à La Taillerie 40 ans plus tard

    L'installation du "couple en cavale" dans son nouveau foyer se fera facilement
    grâce à l'hospitalité sans faille d'habitants de Montagnac auprès desquels
    il trouvera toujours aide et réconfort jusqu'à la fin des hostilités.

    Des liens d'amitè et de solidarité très forts vont se nouer rapidement
    entre Léonce, Madeleine et certains habitants de Montagnac.

     

    Léonce et Madeleine décident alors qu'il est grand temps de reconstituer le groupe familial.

    Armés de leur courage et de leur espoir, difficiles à imager aujourd'hui, ils retournent à vélo par deux fois à Consac récupérer différents objets indispensables à leur vie quotidienne.
    Léonce, aidé par sa force athlétique hors normes, n'hésite pas à accrocher à son vélo une énorme "carriole" grâce à laquelle il ramènera en Dordogne un chargement très.....hétéroclite (nourriture, vêtements, vin, eau-de-vie.....6 oies vivantes pour les oeufs et la chair et diverses autres choses utiles).



    Il faut dire qu'il bénéficiait d'un vélo à la hauteur de ses capacités physiques !
    En effet, son neveu Robert G. ,mécanicien avant la guerre,
    lui avait installé un superbe dérailleur (objet rare à l'époque).

    ALors, il pouvait appuyer ser les pédales, le Léonce !

     

    Ils ne comptaient pas les kilomètres, les forçats de la route, car il fallait faire vite et profiter de la belle saison.
    Ces différents allers-retours avaient permis à Léonce de prendre de nombreux repères sur le trajet ainsi que les contacts nécessaires pour passer en relative sécurité la ligne de démarcation.

    Jugeant qu'il possédait suffisamment d'informations fiables, il envoie Madeleine chercher ses deux filles Ginette (10 ans) et Lucette (6 ans). Madeleine ramènera ses deux filles, bien jeunes,.... à bicyclette malgré les risques d'une telle expédition.


    Ginette revoit certaines images inscrites à jamais dans sa mémoire :
    " Je me souviens que Maman disait qu'il fallait se rendre chez Mr ..., lui donner de l'argent, attendre chez lui qu'il vienne nous chercher le soir. Il était venu pour nous accompagner un bout de chemin dans les bois. Arrivées "sur place", Maman m' avait dit : Tu vois, il faut prendre ce chemin, bien regarder et si il n'y a pas de boches...aller se cacher là-bas avec nos vélos. Là-bas, c'est le zone libre...après on sera plus tranquilles.
    Madeleine, la courageuse, ramenait ses filles non seulement en risquant de se faire arrêter par les Allemands mais également en mettant en péril sa santé car....elle portait en elle son troisième enfant.
    En effet, quelques mois plus tard, elle donne la vie à sa troisième fille Simone le 18 Octobre 1942 à Montagnac.

    Léonce ne sera pas de ce voyage car depuis quelques semaines, sa vie a changé.
    Les relations d'amitié er de confiance qui se sont nouées avec les personnes qui avait accueilli la famille à Montagnac ont permis à Léonce de réaliser son souhait d'en découdre enfin avec les "Boches".

    Il intégre un groupe de résistants locaux commandés par Albert Rigoulet, dit "le Frisé".

     

    La famille est enfin regroupée, Léonce est officiellement ouvrier forestier et s'est fait accepté par les Résistants.
    Il était temps car quelques semaines plus tard se produit un évènement qui va changer le cours de la guerre.

     

    La Dordogne comme tout le reste de la France qui bénéficiait du statut de "zone-libre" va voir sa situation basculer brutalement le 11 novembre 1942.

    Ce jour-là, à 6H 30 du matin, les troupes allemandes franchissent la ligne de Démarcation et enhahissent très rapidement le sud de la France : c'est l'opération " ATTILA".

    Hitler venait de donner l'ordre à ses troupes de réagir à l'invasion du Maroc et de l'Algérie par les troupes alliées 3 jours plus tôt. Craignant un débarquement allié par le sud, il décida d'occuper le terrain et franchit sans la moindre difficulté celle ligne car les autorités françaises demandèrent aux troupes de l'armée française d'armistice de n'opposer aucune résistance.

    Cette invasion vient confirmer Léonce dans son désir d'en découdre.

    Son engagement devenait évident : toute la France est maintenant envahie.
    Léonce apprendra plus tard que le 22 juin dernier Laval avait prononcé un discours dans lequel il souhaitait clairement la victoire allemande parce que, sans elle, "le bolchévisme s'intallerait partout", et encore plus tôt le 07 juin le port de l'étoile jaune avait été institué pour les Juifs.

    S'en était fini de la Révolution Nationale prônée par Pétain.
    La position des Autorités Françaises se dévoilait enfin !

     

    Les unités allemandes occupent en quelques heures tous les points stratégiques du département : dépôts d'essence et de munitions, centraux téléphoniques, installent leur Etat-majour à Périgueux et une antenne à Bergerac, la Gestapo envoie ses premiers agents quelques jours après à Périgeurx pour établir le contact avec Paul Lapuyade (responsable du P.P.F. et recruteur de la Légion Tricolore) qui va devenir le premier agent de renseignements de la région pour les Allemands.

     

     

    Cette invasion allemande va sonner le glas d'une période relativement défensive pour une position tournée vers l'action pour la Résistance.
    Léonce entre donc en résistance pendant cette période de changement stratégique des forces en présence.

     

    La Résistance armée

     

    Léonce va rapidement découvrir les réalités quotidiennes du résistant faites d'instabilité, de peur, de mobilité à tous moments, de rage dans le coeur, de sueur, de larmes.
     

     

    Il fera alors partie de ces nombreux maquisards dits "légaux", appelation qui parlait des gens qui faisaient de la résistance sans avoir abandonné leur activité habituelle et les habitudes normales de vie.

    Il vivra comme tous les autres "légaux"dans une légalité plus que fragile car, bien qu'officiellement ouvrier forestier vivant avec sa petite famille au vu et au su de la population, la présence de cet "inconnu" sur la commune et surtout ses absences répétées et plus ou moins longues intrigueront certaines "âmes".

     

    L'insécurité qu'il faisait ainsi vivre à ses proches était parfois tout aussi dangereuse que celle que connaissaient les "maquisards" qui avaient fait le choix de rompre avec la vie normalepour aller vivre en autarcie dans le maquis, dans la clandestinité, au hasard des évènements et de l'hospitalité de la population.

     

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    Ainsi, sa fille Ginette qui allait à l'école communale de Montagnac devait-elle subir les réflexions répétées de l'instituteur qui ne cachait pas son penchant pro-allemand.
    - "Ginette ! qui est ton père? D'où venez-vous ? Je suis sûr qu'il est communiste, qu'il est maquisard ! -

     

    Ginette, du haut de ses 10 ans, bien qu'effrayée par le ton autoriraire de l'instituteur ne répondit jamais (les consignes de Léonce étaient très claires à ce sujet:

     

    "Je travaille dans les bois pour gagner ma vie, c'est tout ce que tu sais").

     


    Se méfiant des réactions de cet inconnu qui en imposait physiquement,
    il n'allait pas plus loin dans l'interrogatoire (courageux mais pas téméraire!).
    Il se contentait d'isoler Ginette au fonds de la classe
    et de l'oublier...jusqu' à la prochaine série de questions sur son père.


    l'école de Montagnac

    Aujourd'hui, 62 ans plus tard, Ginette se souvient toujours de la peur qui l'habitait
    quand elle partait pour l'école.

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    Le groupe qui l'accueille est commandé par un résistant de la première heure: Albert Rigoulet, décrit comme un grand gaillard athlétique, aux cheveux noirs frisés qui lui donnérent son nom de guerre "Le Frisé".
    Il possédait une ferme à St Jean d'Eyraud, petite commune proche de Montagnac.

    Il s'était déjà illustré en octobre 1941 en organisant dans la nuit du 10 au 11 sur sa commune, au lieu-dit Lagudal (une immense clairière cernée par la forêt), un parachutage d'hommes avec Pierre Bloch, député de l'Aisne qui avait des attaches dans la région, et le maire de Villamblard le Docteur Dupuy.

     

    Ces hommes, quatre officiers anglais du S.O.E. (Special Operations Executive), étaient chargés d'organiser et former les réseaux de résistance et apportaient des fonds.

     

    Il s'illustra à nouveau (avec l'aide notamment de Georges Gégué et Lazare Rachline dit Lucien Rachet) dans la nuit du 16 au 17 juillet 1942 en faisant évader du camp de Mauzac (près de Lalinde) l' officier anglais qui avait été fait prisonnier par la gendarmerie de Villamblard ainsi que les trois autres arrêtés en compagnie de Pierre Bloch à Marseille par la Police de Vichy.

     

     

    Il ne saura que très peu de choses de tout ceci, car l'organisation de la Résistance et la circulation des informations étaient très cloisonnées.

     

    Il comprendra que le terme "maquis" représente un mouvement très improvisé, à l'initiative d' hommes de bonne volonté, inorganisé pendant de nombreux mois du fait des changements répétés de responsables locaux des différents mouvements de résistance.
    Il constate que la Politique divise le mouvement de la Résistance.

    Que saura-t'il de l'organisation de la Résistance en Dordogne en trois grandes zones en septembre 1942 ? Sans doute rien !

     


    Il est fort probable qu'il ne savait pas que son groupe commandé par "Le Frisé" était, comme trois autres groupes, sous l'autorité d'un certain Lucien Marcou, dit "Regain".

     

    L'activité allemande de répression va s'amplifier rapidement, grâce notamment à l'efficacité de l'Office de Recherches et d'Information (O.R.I.) chargé de collaborer avec les services de la police allemande.

    Une filière d'acheminement de résistants vers l'Espagne est demantelée à Périgueux.


    De nombreux résistants sont arrêtés: le professeur Bonneaud (responsable régional "Franc-Tireur", Charles Hinstin (responsable régional de l' A.S.), Armand Dutreix (responsable régional de Libération), Raymond Berggren dit Bordeaux 48 (chef du mouvement La France Combattante et responsable A.S. de la Dordogne) ainsi que des résistants plus anonymes servant de "boîtes aux lettres" pour leurs réseaux.
    La plupart de ces personnes seront déportées et n'en reviendront pas.
    Cette première vague de rafles est un coup très dur porté à la Résistance (les historiens parlent d'une centaine d'arrestations).

    La Milice, quant à elle, déborde d'activité en ce début d'année 1943.


    A périgueux, elle compte dans ses rangs 400 membres qui assurent le maintien de l'ordre lors des conférences de propagande, procèdent à des arrestations comme à Périgueux le 10 mai.

     

    Malgré les évènements qui devenaient de plus en plus violents la vie continuait.
    Ainsi Ginette fit sa Première Communion à Montagnac au printemps 1943

     

     

    Ginette se souvient que ce jour-là "Papa n'était pas là" et qu'il n'y avait pas eu de repas de fête.

     

    Mais le pire viendra avec l'arrivée de l' Untersturmführer Michel Hambrecht à la direction du Sicherheitspolizei (la Gestapo) de Périgueux.
    Assisté de deux adjoints allemands, aussi barbares que lui, et du fameux Paul Lapuyade qui poussera le zéle dans la collaboration jusqu'à participer à des arrestations et des expéditions punitives, il va faire régner rapidement la terreur.
    Le 7 juillet 1943, il fait arrêter le maire de St Astier qui sera déporté en Allemagne.
    Le 14 juillet suivant, quatre habitants de la même ville sont arrêtés, deux d'entre eux seront également déportés.

    Pendant ce temps-là, les principaux mouvements de résistance " Combat" "Franc-Tireur" et "Libération" qui avaient décidé de fondre leur organisation fin 1942 sous l'appellation "Armée Secrète" A.S. continuent leur réorganisation en trois grands secteurs pour le département : Nord, Centre et Sud.

    Chaque secteur, strictement défini, est divisé en sous-secteurs précis.
    Le secteur Sud, où se trouve Léonce, qui est placé sous l'autorité de Bergeret, est divisé en treize sous-secteurs; celui de Lamonzie-Montastruc est placé sous la responsabilité de Lucien Marcou dit "Regain".

    Les "Francs Tireurs et Partisans" se dotent également d'une véritable organisation sous l'autorité d' un état-major régional qui contactera les groupes isolés pour les fédérer.

     

    Léonce s'engage donc dans le mouvement de la Résistance de Dordogne
    à une époque où son organisation devient très structurée.

     

    Bergeret organise avec ses chefs de secteurs les opérations de parachutages d'armes qui vont s'intensifier dans le secteur Sud grâce au réseau S.O.E. "Wheelwright" dirigé par Georges Réginald Starr alias "Hilaire".

    Le premier de ces parachutages d'armes aura lieu à Prigonrieux le 12 août 1943, dans le secteur de Pinson responsable du sous-secteur de La Force (7 containeurs d'armes seront récupérès).
    Les maquis continuent de se renforcer en hommes, les réfractaires au S.T.O. institué en 1942 trouvant dans les "maquis" la solution la plus efficace pour se soustraire aux autorités allemandes et à la Milice.
    Les parachutages se multiplient, les différents maquis locaux récupérent les précieuses armes venues d'Angleterre.

    En ce début d'année 1943, la situation est relativement calme.
    Les actions des maquisards sont peu nombreuses; l'heure est à la constitution des stocks d'armes.
    Les troupes allemandes ne mènent pas d'action d'envergure dans la région mais continuent cependant des opérations ponctuelles comme des arrestations à La Coquille avec "torture au menu" avant déportation.

     

    Mais la Dordogne va rapidement entrer en véritable état de Guerre.

    La Résistance entre véritablement en action en Septembre 1943.

     

    Les premiers sabotages de lignes téléphoniques ont lieu (poteaux sciès, fils coupés), des vols d'essence, de poudre d'explosifs, d'armes et de de munitions (notamment à Bergerac par les groupes Roland et Mireille) viennet compléter les "actes de terrorisme" des maquisards.

    Et pour la première fois, le 9 octobre 1943, un groupe de résistants ose s'attaquer directement à l'occupant en faisant exploser deux bombes
    au siège de la Police et de l'Etat-Major allemand à Périgueux.
    Les dégâts sont considérables...la réaction est immédiate !

    S'en suit une vaque d'arrestations à Périgueux, la plupart des personnes arrêtées seront déportées.
    S'en suit également la"descente" d'une grosse colonne motorisée allemande "au camp de réfractaires" de Cendrieux.
    Au hameau de "Lagerthe", ils découvrent, outre des armes, l'organigramme des responsables départementaux de l' A.S. (ils ont des noms, des indications de caches d'armes...).

    Les actes s'enchainent !

    Roger Verdier, responsable local de la propagande allemande, est "éliminé" par trois résistants de l' A.S. à l'hôpital de Sainte-Foy-la-Grande.

    Les allemands quant à eux, procédent à de nombreuses arrestations et notamment à celles de responsables de l'A.S.

     

    La fin de cette année1943 voit la création des F.F.I.

     

    Un accord signé à l'échelon national le 23 décembre 1943 entre les responsables de l' Armée Secrère A.S. et les Francs Tireurs et Partisants (F.T.P.) prévoit la fusion des deux états-majors en une seule organisation appelée les Forces Françaises de l'Intérieur F.F.I.

    Mais cet accord restera à l'état de "chimère" en Dordogne jusqu'en aôut 1944 !
    Chacun des deux mouvements mènera ses actions sans concertation avec l'autre, tant le "contexte politique" de leur engagement était ou semblait (à chacun de juger) différent.

    Début Janvier 1944, la répression allemande continue de plus belle.
    Le 16 janvier, les allemands arrêtent à Mussidan plus de trois cents personnes soupçonnées d'aider le maquis. Une cinquantaine d'entre elles sera transférée à P&rigueux puis déportée.

    Janvier1944 marque aussi le début des sabotages des voies ferrées en Dordogne et du matériel roulant comme la destruction le 11 février de la locomotive du train Brive-Agen près des Eysies.

    En février de cette année ont également lieu les plus importants parachutages dans la région, notamment à Tourliac, à St Pierre d'Eyraud. Il fallait faire très vite pour récupérer et mettre à l'abri les armes qui tombaient du ciel, protégées dans des tubes métalliques de 200 kgs.

    Léonce ne disait jamais rien de ses activités quand il revenait.
    Ginette voyait bien avec ses yeux d'enfant qui grandit trop vite que "maman était toujours inquiète" et que "quand il rentrait, Papa ne disait rien". Il était quelqu'un d'autre, très nerveux, à la fois irritable et très abattu.

     

    En ce début d'année 1944, les évènements prennent donc de l' ampleur.
    Les actions violentes contre l'occupant sont de plus en plus nombreuses, la chasse aux collaborateurs s'organise (ainsi 24 collabos sont éliminés en février).
    Jugeant la situation exposive, Berlin décide de renforcer ses troupes en faisant venir de Paris la Division SS motorisée du général Brehmer.

    Dès son arrivée fin mars ,Les Allemands organisent des opérations de répression et de rafles à grande échelle dans toute le Périgord.
    La population civile n'est pas épargnée et paie souvent pour les "terroristes" qui échappent aux opérations allemandes.

    La Division Brehmer restera en Dordogne du 16 mars au 2 avril 1944 et y sèmera partout la terreur et la désolation en agissant de façon très méthodique, en appliquant un plan défini à l'avance.
    Chaque jour, une région différente est choisie. Depuis un P.C. installé dans un bourg principal partaient dans toutes les directions des patrouilles qui quadrillaient de façon méthodique les hameaux de la campagne.
    Partout, ce ne sera que pillages, arrestations et éxécutions sommaires, maisons et fermes incendiées, déportation pour certians résistants et les juifs.

    La liste des villages ainsi martyrisés est immense mais citons au moins le village de La Bachellerie encerclé le 30 mars 1944.
    Après avoir arrêté deux familles juives qui tentaient de fuir, ils incendient plusieurs maisons et regroupent les personnes arrêtées sous le préau de l'école.
    Après avoir trié les femmes et les juifs d'un côté et les hommes de l'autre ils fusillent 17 personnes dont 10 juifs et emmènent en camion femmes et juifs à Périgueux. Les juifs seront déportés.

    Les actions violentes de résistance reprennent un peu partout pour atteindre une ampleur jamais atteinte.
    La Résistance exerce une pression de plus en plus forte sur les troupes allemandes; les régions de Sarlat et de Bergerac (où se trouve Léonce) sont jugées très "mauvaises" par le chef de la Police allemande de Périgueux.

     

    Des opérations de représailles sont organisées dans le Bergeracois.


    Des collaborateurs notoires sont un peu partout exécutés; la Poudrerie de Bergerac est bombardée par un avion allié, les Allemands perdent la maitrise des moyens de communication, la Milice pourchasse les résistants et se livre, un peu partout, aux mêmes exactions que le Allemands.

     

     

    La Dordogne connait alors une véritable situation insurrectionnelle.


    Les différents réseaux de Résistance sont dans l'attente des "Messages Personnels" que la B.B.C. diffusera le 1er Juin 1944.


    Ces messages, destinés à mettre tous les réseaux en alerte, signifiaient à tous les combattants de l'ombre que tout le monde devait se tenir prêt à passer à l'action.

     

    Le 5 juin 1944 à partir de 21 h 15
    la B.B.C. diffuse enfin les messages libérateurs.

    Les rouages secrets de la Résistance
    allaient se mettre en marche pour libérer le territoire français.

     

    Le 6 Juin , peu après minuit, débutait l'opération "Overlord"
    C'était le début du Débarquement allié en Normandie.

     

    Dans le Bergeracois on assiste au rassemblement général des résistants
    De nombreuses personnes, jusqu'ici attentistes, franchissent le pas...et viennent s'enrôler.
    On distribue les armes, on organise les groupes.

    Conformément aux plans élaborés par les Alliés, de nombreux sabotages de voies de communication et de lignes téléphoniques sont réalisés.
    De solides barrages, édifiés sur les routes, sont défendus par des groupes souvent fortement armés; les routes sont rendues inutilisables par des tranchées anti-chars et par des arbres abattus, les voies ferrées sont coupées.

    Dès le lendemain de grandes localités sont prises comme Nontron, Sarlat, Bergerac.
    Partout les positions allemandes sont soient assaillies, soit encerclées mais les représailles sont souvent terribles.

     

    Ainsi le 11 juin, les maquisards F.T.P. "Roland' et "Kléber"prennent Mussidan, détruisent un train allemand mais doivent se replier suite à l'arrivée de renforts allemands.
    Les représailles sur la population seront terribles : en fin d'après-midi 52 personnes seront fusillées près de la mairie, la ville sera mise à sac et pillée.

    Alors que la division "Das Reich" a quitté la région pour rejoindre le front de Normandie, les responsables allemands decédent depuis Périgueux de passer à l'action contre la Résistance en envoyant, ,notamment, des renforts à la garnison de Bergerac.

     

    Le 12 juin une première colonne tente de rejoindre Bergerac mais connut plusieurs accrochages avec des groupes de résistants ( comme le groupe Marianne à Fauchièras qui y tenait un barrage sur la R.N. 21)) et dut se replier en se vengeant sur les civils qui se trouvaient sur son chemin.
    Le même jour, les troupes allemandes se lancèrent dans une opération dans communes au nord de Périgueux où elles se livrèrent à de véritables massacres : arrestations puis exécutions, pillonage de villages aux obus, incendies de maisons.

     

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    Ils fusillent les hommes mais également des femmes et des enfants comme la famille Frydmann (le père, la mère et ses deux enfants) qui après avoir été abattus finiront carbonisés dans l'encendie de leur maison.

    Le 14 juin les Allemands tentent une nouvelle fois de se rendre maitres de l'axe Périgueux-Bergerac.
    Les hommes du groupe Marianne (A.S. Dordogne Nord) les attaquent à Grun.
    Bergeret, responsable du secteur sud, décide de s'attaquer à ce convoi .
    La responsabilité de cette opération est confiée au Commandant Paquette qui mobilise toutes les forces locales disponibles : les groupes "Le Frisé" "Boby" "Benjamin" "Dépé" sous les ordres de Lucien Marcou dit Regain, ainsi que les groupes "François 1er" et "Joseph".

     

    Le groupe Boby

     


    L'imposant groupe ainsi constitué (environ 300 hommes) montera une embuscade au nord de La Ribeyrie.

     


    L'accrochage eut lieu en fin de soirée et infigea de lourdes pertes aux Allemands (les archives du S.H.A.T à Vincennes parlent de 40 soldats allemands tués).

    Ce même jour, la garnison de Bergerac est renforcée avec l'arrivée de la Formation Kopp (division de Panzer).

    Dans les jours qui suivent, de nombreux accrochages ont lieu dans tout le Bergeracois; les victimes sont nombreuses.
    Les allemands s'attaquent à tout ce qui bouge, résistants ou civils car ils se livraient à une véritable chasse aux terroristes.



    Ainsi, Ginette se souvient-elle très bien de ce jour où Léonce est arrivé en courant en en hurlant au village :


    "Sauvez-vous vite, vite ! Le Boches arrivent ! Ils tirent sur tout le monde! Allez vous cacher dans les bois!"
    Elle se revoit, courant vers les bois avec les autres personnes du village. "On avait juste eu le temps de mettre quelques affaires dans des valises. Les boches nous tiraient dessus à la mitrailleuse depuis le village ."

     

    Le 21 juin, les Allemands se vengent sur le village de Mouleydier pourtant défendu par les groupes "Alexis" "Cerisier" "Marsoin" "Loiseau" "Bertrand" "Leduc" "Pistolet".
    Les Allemands donnent l'assaut dès 5h 30 du matin avec des moyens important en hommes, en chars et chenillettes.

     


    De nombreux résistants sont tués, blessés et achevés, certains arrivent à s'enfuir,

    d'autres se rendent.
    Une grande partie de la population est "parquée" devant une scierie où plusieurs résistants furent fusillés.

     


    Le village fut pillé (les camions chargés de linge, de postes T.S.F., de ravitaillement....partaient du village en direction de Bergerac pour en revenir à vide) et incendié.
    Les derniers prisonniers furent fusillés à 22 heures (tous résistants de la région).

     

     

    En juillet de nombreux combats ont lieu dans le Bergeracois., les arrestations continuent.

    Plusieurs résistants sont arrêtés à Prigonrieux et seront déportés.

     

    La répression allemande repart de plus belle car l' occupant sent bien que les évènements lui échappe de plus en plus.
    De nombreux villages sont "visités" par les boches, les habitants sont interrogés, molestés, fusillés sommairement.

     


    Les groupes de résistants sont aussi poursuivis; ainsi le groupe "Marcel" (A.S. Dordogne Centre) est attaqué à son cantonnement et est obligé de se replier en secteur sud dans les bois de St Julien-de-Crempse.

     

     

    Le 5 aôut un détachement de 85 soldats allemands arrive à St Jean d'Eyraud (proche de Montagnac) et met le feu aux bâtiments de Albert Rigoulet dit "Le Frisé" (le chef de groupe de Léonce) et d'un autre camarade combat Georges Hivert qui sera, de plus arrêté et fusillé à Mussidan quelques jours plus tard.

    La région de Montagnac, où Léonce et sa famille vivaient, se retrouvait encore un peu plus au centre d'un secteur qui allait connaitres de durs combats. Ces combats devaient être parmi les derniers en Dordogne.
    En effet, depuis plusieurs semaines, les résistants occupent pratiquement tout le département, hormis les grosses villes comme Périgueux et Bergerac.

    Alors que les Allemands ont disparu dans toute la partie nord de la Dordogne et que les jeunes résistants sont de plus en plus imprudents en défilant en voiture, drapeau français au vent en exhibant leurs armes...les hostilités repartent de plus belle au sud.
    St Julien-de-Crempse, commune limitrophe de Montagnac, était l'endoit où Regain avait établi son P.C et dirigeait les différents groupes sous ses ordres.

    Le 9 aôut 1944 , après avoir capturé un agent de liaison du groupe "Joseph" et sans doute l'avoir "fait parlé", plusieurs centaines de soldats allemands encerclent le P.C. de "Joseph" et "Regain" soit environ 80 combattants. Les autres groupes de résistants (notamment ceux de Villamblard et Campségret) arrivent à la rescousse pour dégager leurs camarades en infligeant de lourdes pertes aux Allemands (120 tués selon Bergeret). Selon le témoignage de Robert C...(camarade de maquis) Léonce faisait partie de ces derniers.
    Pour tout commentaire, Léonce dira en rentrant à la maison quelques jours plus tard: "Putain, c'était pas beau à voir, ça sentait pas bon (il parlair des corps des soldats allemands abandonnés sur place).

    En représailles les allemands fusilleront tous les hommes raflés dans le bourg de St Julien, soit 17 personnes de 17 à 80 ans.

     

    Puis arrive la journée capitale du 15 aôut 1944 !

    Les troupes alliées débarquent en Provence.

     

     

    http://jcombas.free.fr/leoncepicqhommelibre/ladordogneetla%20resistance.htm

     

     

     

     

     

    « Le système de répression allemandles exactions de la division Brehmer en Mussidanais »
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