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Ils racontent leur vie à RAWA-RUSKA
Selon une circulaire émise le 16 janvier 1942 sous la référence 42/Sü/9 873 par le Service central de sécurité du Reich (RSHA), plus de 30 000 évadés parcouraient en permanence les territoires allemands ou contrôlés par le Reich.
Suite à ce constat, les autorités estiment le temps venu de mettre un terme à cet état de fait et décrètent que « l’évasion n’est plus un sport »1.
On reconnaît bien l'entrée du camp, telle qu'elle apparaît, à l'envers, dans l'aquarelle de Vanderheyde (détail à gauche).
Le fait qu'il s'agit d'une photo de propagande se manifeste par le caractère impeccable des uniformes des prisonniers, distribués pour l'occasion
Précisons au préalable que les déportés de Rawa Ruska étaient tous de nationalité française ou belge (en très grande majorité française).
Ils avaient été mobilisés en 1939 (certains étaient même sous les drapeaux depuis 1936) et avaient participé à la très dure et très meurtrière bataille de France de 1940 (environ 100 000 tués en seulement 2 mois) jusqu'à ce que nos troupes submergées par un ennemi infiniment plus puissant en matériel mécanique et aérien, soient contraintes à cesser le combat en juin 1940.
Deux millions de ces combattants furent faits prisonniers, dont la plupart d'ailleurs, après l'armistice, en violation des conventions internationales (et même des conditions d'armistice édictées par les nazis), exténués, démoralisés, accablés par la défaite. Les jours et les semaines qui suivirent la capture furent terribles : - longues marches épuisantes (40 à 50 km par jour) sans ravitaillement pendant plusieurs jours, couchant la nuit, parfois complètement trempés par suite d'orages, dans des pâtures à vaches boueuses, tout cela accompagné de mauvais traitements, coups de crosses et coups de baïonnettes ; il y eut même des exécutions au cours de tentatives d'évasion ou dans les cas d'impossibilité physique de suivre la colonne.
Ces longues marches furent suivies du transport vers l'Allem
Cette décision vise à impressionner les détenus, prévenus qu’ils perdent la protection de la convention de Genève, déjà peu scrupuleusement appliquée, en cas d’utilisation d’habits civils et de faux documents. Le message est également adressé aux gardiens des prisonniers, menacés d’être affectés sur le front de l’Est en cas de relâchement de leur attention.
Mirador à Rawa-Ruska
D'après La Déportation, sous la dir. d'André Leroy, Paris, 1967, p. 235.Surtout, cette circulaire permet de prendre conscience de l’ampleur du phénomène d’évasion.
GAILLAC (81)
- Histoire. Deux Gaillacois sont passés en 1942 par un camp disciplinaire d'Ukraine.
À l'est d'Auschwitz, aux confins de la Pologne et de l'Ukraine, les nazis avaient transformé une ancienne caserne de l'Armée Rouge en camp disciplinaire.
À partir d'avril 1942 et jusqu'en 1943, le camp 325 de Rawa-Ruska, destiné
aux « fortes têtes », aux prisonniers évadés récidivistes.
Plus de 20 000 Français mais aussi des Belges y ont séjourné.
Agriculteur à Montans, Élie Bousquet a franchi le portail de son premier camp de prisonniers en avril 1940.
L'année suivante, première évasion avec un copain pour quelques jours seulement et la sanction : sept semaines de commando disciplinaire dans une carrière de pierre.
Peu après, Elie et deux autres prisonniers reprenaient le large après avoir scié les barreaux de leur baraquement :
« Nous nous sommes fait prendre bêtement par un groupe de bûcherons allemands qui nous avaient repérés ».
De Rawa-Ruska, il se rappelle d'abord cet avertissement placardé à l'entrée du camp :
« S'évader n'est plus un sport ».
Intégré à un commando de 500 hommes pour refaire des routes (avec des outils pour 300 travailleurs) :
« Nous étions logés dans une écurie. Il y avait un robinet d'eau pour tout le camp, alors nous nous abreuvions parfois dans les flaques de pluie. Le matin, on nous servait du café, infusé avec des branches de sapin et la soupe de midi était à peine améliorée avec cinq ou six grains de millet… Toutes les semaines, nous subissions une fouille qui durait 24 heures. On ne pouvait pas s'évader. J'ai entendu parler d'un tunnel mais il a été vendu par un espion des Allemands ».
« Le commandant du camp s'appelait Fournier
Il se baladait tout le temps avec un pétard »
« Le 14 juillet 1942, nous avons fait une mauvaise farce aux Allemands, en défilant avec des drapeaux français que nous avions fabriqués en cachette. »
LE TRIANGLE de la MORT
UN TRAIN TROP LOIN
Comme Élie Bousquet, Raymond Roque avait 24 ans en 1942 lorsque son périple des camps l'a conduit à R awa-Ruska pour une dizaine de jours.
« Avec deux prisonniers, je me suis évadé d'un camp de Saxe, en février 1942. Nous avions repéré des trains en partance pour la France. Nous nous sommes enfermés dans un wagon à destination de Fontainebleau. Les Allemands étaient méfiants ; le général Giraud venait de s'évader. A la frontière française, près de Belfort, les Allemands ont pesé le wagon et nous ont dénichés. »
« Nous avons été conduits à Colmar, puis Nancy, Strasbourg et en Allemagne, à Ludwigsburg, parqués à 500 dans d'anciennes écuries. C'était le centre de rassemblement avant le départ pour Rawa-Ruska.
Nous avons chanté « La Marseillaise » et notre hymne « Dans le c… »
« Après huit jours de train, à 50 bonhommes par wagon, un pain, une boîte de conserve chacun, nous sommes arrivés à Rawa à la tombée de la nuit. »
Pour Raymond, les prochaines étapes ont été le chantier d'une gare de triage, près de Cracovie, et pire un chantier en Ukraine, à -30°C, puis à partir de février 1943, une compagnie disciplinaire de nettoyage des zones de bombardement, près de Berlin.
Henri Beulay
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Tags : camp, 1943, rawa, ruska, allemands
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